Le temps passait lentement dans sa petite chambre d'hôpital. Uniquement rythmé par le bruit des machines, un ronronnement constant qui commençait à la faire devenir folle. Si elle l'avait pu, Julianna serait sans doute allé se promener dans le couloir. Mais entre ses fractures aux jambes et son genou immobilisé, elle ne pouvait pas sortir de son lit seule.
Elle tapota des doigts sur son téléphone, lassée des quelques jeux auxquels elle jouait habituellement. Elle s'ennuyait et n'avait pas envie de rouvrir l'une de ses applications. La seule chose qui aurait pu l'intéresser encore un peu était sa messagerie, mais avec James au travail et Cameron à l'école, elle ne risquait pas d'avoir de leurs nouvelles. Elle appréciait recevoir des photos de temps en temps, soulagée que son fils sembler aller bien. Il ne pouvait pas venir la voir dans le service de soins intensifs, même si elle avait terriblement envie de le serrer contre elle et de le sentir se lover contre elle.
Julianna tenta de se réinstaller sur son lit pour pouvoir atteindre sa table de nuit et attraper l'un des livres déposés par une de ses amies. Elle ne put s'empêcher de grimacer de douleur, ayant bougé par inadvertance ses jambes. Le pic de douleur mit quelques minutes à s'atténuer, pendant lesquelles elle serra les dents, attendant que ça passe tout seul plutôt que de prendre une dose de morphine - elle se sentait toujours vaseuse à cause du médicaments, et préférait donc éviter d'y avoir recours.
Elle tenta ensuite de se concentrer sur son roman, mais avait du mal à se laisser porter par l'histoire, pourtant simple. Son cerveau déconnectait toujours, la laissant perturbée par les bruits des soignants dans le couloir, ou les bips du scope quand son rythme cardiaque s'élevait un peu. Elle s'efforçait pourtant de lire, même si les mots se mélangeaient un peu sous ses yeux, préférant ça à l'ennui de se retrouver immobile dans une chambre d'hôpital.
Elle releva la tête en entendant quelqu'un frapper à sa porte, surprise par ce simple bruit. C'était rare que les soignants prennent le temps de le faire, habitués qu'ils étaient aux patients inconscients ou pas vraiment en état de comprendre ce qu'il se passait autour d'eux - elle en avait fait partie avant qu'ils ne redescendent ses doses d'antidouleurs.
« Entrez ? » tenta-t-elle de dire, après s'être éclaircie la gorge.
Il y a des annonces qui font l’effet d’une bombe, littéralement. Si après les explosions qui avaient secoué la ville, je m’étais rapidement rassuré en sachant mes filles en sécurité, cela avait rapidement changé lorsqu’après un simple message ébranla le détachement naturel dont je me parais. Julianna, cette femme que j’apprécie et dont je semblais renier la véritable nature de mes sentiments était à l’hopital. Même si le message se voulait rassurant, le spectre de la mort de mon épouse, la mère de mes filles, me fit réaliser que je n’étais vraiment pas prêt à la perdre elle. Pour quelqu’un ne voulant plus avoir quoi que ce soit à faire avec ce genre de relation, je me trouvais fort attaché.
Je n’avais pas vraiment réfléchi, à la fin de ma journée je m’étais rendu à l'hôpital, un bouquet de fleur d’automne à la main, j’avais demandé son numéro de chambre avant d’y arriver non sans une certaine peur au ventre. Je n’arriverais pas à subir une nouvelle perte. Je m’ouvrais si peu aux autres que ça me semblait impossible de ressentir ça à nouveau. C’est donc assez nerveux que je me présentais à la porte de sa chambre pour toquer et espérer avoir une réponse, ce que j’eus, même si la voix semblait faible. Ouvrant donc, je me présentais avec un sourire assez tendu et mal à l’aise, preuve que je sortais de ma zone de confort une nouvelle fois. « Salut... », soufflais-je comme par peur de réveiller une douleur juste avec ma voix. « Je t’ai ramené quelques fleurs, j’ai aucune idée de si il y a un vase ici, mais je suis presque sûr que c’est normal d’apporter des fleurs à une blessée. », c’était vraiment maladroit, comme si l’homme laissait place à un adolescent, mais n’était-ce pas le cas ? La dernière fois que j’avais eu besoin d’attirer l’attention d’une fille c’était au lycée, avec ma futur femme. Je n’étais définitivement pas doué.
« J’étais inquiet, je voulais m'assurer que tout allait bien, je suis médecin en quelque sorte... » c’était pathétique, comme cette peur qui battait dans mes tempes à mesure que je m’approchais pour lui donner ce bouquet, « C’est pathétique, je dérange peut-être, je vais y aller. » et la fuite, ce n’était pas franchement dans mes habitudes, mais là. La regarder en face, avec les souvenirs, les craintes… J’étais perdu.
Posté Mar 20 Oct - 16:55
Âge : 34 ans Nationalité : Américaine Statut Matrimonial : Veuve, 1 fils de 8 ans Métier : Ingénieure en hydraulique
La porte s'ouvrit pour laisser passer Caleb, à la grande surprise de Julianna. Ils s'étaient vus plusieurs fois, après avoir été mis en contact sur Perfect Love, et le rendez-vous arrangé par les filles de Caleb. Malgré leurs débuts un peu difficiles, dus à leurs caractères forts, ils s'étaient pourtant trouvés quelques points communs, et notamment leur engagement écologique.
Julianna ne savait pas vraiment comment classer leur relation, même si elle sentait que c'était sérieux. Ils y allaient lentement, semblant tous les deux avoir encore des choses à régler avec leurs anciens conjoints. Elle avait pourtant eu besoin de le prévenir, une fois qu'elle avait réglé la garde de Cameron et s'était assurée que James avait bien son fils et que ce dernier allait bien. Pour autant, elle ne s'était pas attendue à ce que Caleb passe la voir - ce qui était une agréable surprise.
« Les fleurs sont magnifiques, merci beaucoup » souffla-t-elle quand il lui offrit le bouquet. « Je suis sûre que les infirmières pourront trouver un vase. »
Et au moins, elle pourrait avoir une touche de couleurs au milieu des murs pastels de sa chambre. Avec un peu de chance, il avait choisi des fleurs assez odorantes pour couvrir les odeurs d'antiseptiques qui lui piquaient un peu le nez, même si elle avait fini par s'y habituer. En attendant de pouvoir appeler un soignant, elle les posa soigneusement sur la petite table roulante sur laquelle étaient servis ses repas, profitant du léger parfum floral qui l'entourait maintenant.
« Et ce n'est pas pathétique du coup. Je suis même plutôt contente d'avoir de la visite » tenta-t-elle de le rassurer. « Maintenant que je vais mieux et que je suis bien réveillée en journée, le temps me paraît long. »
Caleb semblait plutôt mal à l'aise, et elle se rappela que sa femme était décédée après un tragique accident. Julianna réalisa un peu tard qu'il était sans doute dans un lieu qui le mettait mal à l'aise et lui rappelait de trop nombreux mauvais souvenirs... Elle se mordilla la lèvre, se sentant un peu coupable et égoïste de le retenir là, avec elle.
« Mais si ça te rappelle des trucs que tu préférerais oublier... Je comprendrai tout à fait que tu veuilles partir. C'est déjà très gentil d'être passé ! »
A part quelques amis, elle n'avait pas vu grand monde. James était occupé entre son travail et s'occuper de Cameron, découvrant la vie avec un enfant - et encore, du haut de ses neuf ans, Julianna savait son fils assez autonome et plutôt aidant avec les tâches quotidiennes. Elle n'était pas suffisamment proche de sa mère ou de son plus jeune frère pour imaginer qu'ils viennent la voir et que tout se passe de façon sereine.
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