Je sais pas exactement pourquoi j’avais fait ça, mais il était évident que je n’avais pas la bonne façon de faire avec lui et si j’avais respecté ce qu’il m’avait demandé, tout ça avait fini par me faire réaliser que je voulais vraiment ça. Après tout ce mariage était la solution à tout, du moins si il acceptait que ce soit vrai, que ce ne soit pas un mensonge. Mais revenir vers lui comme ça ? Ca me faisait peur et j’avais vraiment besoin que quelqu’un d’autre me recadre, qu’une personne que je n’aimais pas puisse me faire vraiment réaliser ce que j’avais à y gagner. Alors j’avais contacté Anna, sa meilleure amie si j’avais bien compris, sur son compte Perfect Neighbour, étrangement, si j’avais pensé à une discussion virtuel, elle me proposa qu’on se rencontre et cette confrontation hypothétique suffit à me faire stresser un peu plus. Je jouais contre le temps, contre mes finances qui ne tiendrait pas éternellement le coup, mais aussi contre la colère de l’homme. Proposant donc de nous retrouver le lendemain à l’heure qu’elle voulait aux jardins d’Alexandria, elle accepta, confirma l’heure et mit fin à la conversation. Je ne savais pas ce que Zayan avait pu dire, mais je doutais qu’elle puisse ignorer la situation.

Le jour J fut douloureux. J’étais déjà au lieu de rendez-vous plusieurs dizaines de minutes avant elle, j’étais nerveux, il faut dire aussi que j’étais en plein sevrage. J’avais consommé beaucoup trop de drogue pour que ça se passe bien, mais après ce qu’il avait pu faire pour me sauver… Je ne devais pas replonger, je devais lui prouver qu’il vallait la peine de se sacrifier, de se reprendre en main. Je devais y croire, je devais y arriver. Me levant donc en la voyant arriver, j’étais déjà livide, un peu transpirant, un peu tremblant. « Bonjour, merci d’être venue. » soufflais-je assez rapidement avant de reprendre sans lui laisser vraiment le temps d’en placer une. J’étais assez mal suite à ce qui venait de se passer, j’avais besoin d’assurance. « Je sais pas ce que Zayan a pu te dire, mais je suis un con, mais un con qui l’aime et qui a besoin de toi, devant lui j’arrive pas à réfléchir, j’arrive pas à voir autre chose que le mal que je peux lui faire. » déclarais-je donc en tendant le bâton pour me faire battre.

« Aides moi à y arriver. » lui demandais-je avant de me reprendre, « S’il te plait. » ajoutais-je en réalisant que j’étais peut-être un peu trop sec, ou exigeant. « Tu veux un café ? Ou n’importe quoi qui pourrait te faire plaisir. » lui proposais-je en étant incapable de rester calme, en étant incapable de ne pas enchaîner les mots. Pourquoi c’était si compliqué ? Pourquoi j’avais pas le droit à une vie simple moi aussi ?
     

Elle était là pour Zayan, ce qui était évident, mais elle voulait aussi le bonheur de son meilleur ami, et je n’étais donc pas encore exclue de l’équation. Elle me signifiait aussi que si je merdais, elle me ferait passer l’envie de recommencer. Hochant donc la tête nerveusement, je la suivis jusqu’à un kiosque où je pourrais sans doute lui payer ce que j’avais proposé. Elle reprit alors, affirmant qu’elle n’avait pas les clés, mais que si j’étais prêt à devenir un homme pouvant lui prouver son amour, peut-être qu’il y aurait une chance. C’était… Je savais que c’était ma dernière chance, il avait la solution, juste pas la bonne méthode et je voulais lui offrir quelque chose de bien. Seulement ça impliquait que ça arrive avant que ma vie n’explose, qu’avant que les choses ne s’empire. D’ailleurs en parlant d’obligation, Anna finit par poser une question, une question simple, mais stupide. Pourquoi ne pas arrêter de se prostituer ? Un peu sonner par la question, je ne réagis pas assez vite lorsque l’on arriva au kiosque, et c’est Anna qui paya le tout, du café à la nourriture. La suivant donc tout penaud jusqu’à une place au calme, je finis par répondre les yeux baissées, « Je… Je fais plus que des strip tease en ce moment, je me prostitue plus. » lui annonçais-je donc sans pour autant lever les yeux vers elle, « Mais… Je suis de Caste 3, j’ai pas de mutuel, j’ai rien et… », elle pouvait comprendre que peut-être Zayan serait une solution, mais je ne voulais pas de l’homme uniquement pour ça. Enfin c’était compliqué, beaucoup trop pour expliquer.

« Ma mère est gravement malade, les soins sont énormes et quand j’étais barmaid ça suffisait pas. », ça ne suffisait toujours pas vraiment, mais elle avait pu vivre quelques années grâce à moi. Soufflant un grand coup, je levais les yeux vers elle, le coeur battant beaucoup trop fort pour mon bien. « J’ai fait une overdose y’a quelques jours et Zayan m’a sauvé… Il m’a demandé d’arrêter de me droguer et j’essaie, j’ai rien touché depuis, du coup je peux être cet homme, je peux lui prouver que je tiens à lui ! », je n’allais pas parler de la demande en mariage, je ne voulais pas le mettre dans une situation délicate ni même le trahir. Je voulais… Je voulais juste qu’il puisse vivre sans que ce qui se passait ici n’impact sa vie. J’avais simplement besoin de parler avec elle, de savoir comment faire. « J’ai… Comment lui prouver que je l’aime ? Enfin il aime les fleures ? Ou le chocolat ? Y’a pas un truc qui pourrait lui plaire ? » demandais-je nerveusement. C’était stupide, beaucoup trop.

« Je veux pas profiter de lui Anna, je sais qu’on dirait que je suis ce genre de mec, que je suis désespéré, que je suis un mec à problème, mais je te promets que je veux pas profiter de lui. Je l’aime, c’est compliqué pour moi d’aimer quelqu’un, mais je te promets. » lui assurais-je. C’était bien compliqué de parler de tout ça sans dire la vérité, mais c’était la meilleur chose à faire. Il fallait que je parle avec, que je sache ou aller et après on y penserait plus non ?
     

Se faire aider serait vraiment utile ? Je n’en savais rien, j’avais un peu peur que l’on me juge plus que de raison. Après si c’était le prix pour le retrouver, pour ne plus le perdre, j’acceptais d’en payer le prix, j’avais juste besoin d’un peu de temps, besoin de prendre la pleine mesure de tout ça. Prenant donc la boisson qu’elle me tendit, je tremblais bien malgré moi alors qu’elle commençait à me parler de choses qui pourraient fonctionner. Seulement il y avait aussi une chose, Zayan avait besoin de stabilité, pas d’une tornade. J’en étais capable de ça ? Depuis ma naissance je n’avais jamais rien eu de semblable, mais c’était bien quelque chose que je désirais. La stabilité. Mais entre vouloir et avoir, il y avait sans doute une différence assez marqué. Encore une fois je n’aurais pas vraiment le choix, cet effort était nécéssaire, je devais y concéder pour lui, pour le retrouver et pour qu’il soit heureux. Elle posa alors une question, savoir si je jouais carte sur table avec elle et à cette question je relevais les yeux vers elle. Elle voulait connaitre les raisons de nos blessures, de ces déchirures. Il était évident que ce n’était pas aussi simple, pas aussi facile. Lui mentir serait sans doute une mauvaise idée, tout comme lui dire la vérité.

« Il y a quelque chose d’autre, mais j’ai pas le droit d’en parler à sa place. », elle ne semblait pas savoir qu’il m’avait demandé en mariage, il faut dire que les raisons n’étaient en rien romantique et si je ne regrettait toujours pas d’avoir refusé, je ne pouvais pas assumer cette situation devant elle. Ce n’était pas uniquement moi, c’était Zayan et moi, je n’avais pas à décider pour lui. « J’ai pas envie de le trahir, si tu ne le sais pas c’est qu’il ne veut pas que je le dise non plus. Mais c’est pas ça qui a vraiment empiré la situation. », enfin pas entièrement car ça serait mentir que de dire qu’il en était sortie grandit après ça. Il avait été prêt à sacrifier trop de chose juste pour me sauver, c’était symptomatique de l’état de notre relation. Il fallait donc assumer les conséquences, la distance et peut-être la douleur. « Mais je te mens sur rien. », ne pas vouloir dire et mentir étaient deux choses différentes et elle n’était pas victime de la seconde.

« Si je remets de l’ordre j’ai une chance de le retrouver sans faire plus de mal ? » demandais-je même si j’étais à peu près certain qu’elle ne pourrait rien m’affirmer faute de réalité, de vérité. On ne pouvait pas présumer du comportement d’un autre. « Je veux pas être égoïste et faire plus de mal juste parce que moi je sais pas vivre sans lui. » soufflais-je pour appuyer ma question. Si il y avait une chance que tout aille bien je n’allais pas reculer, mais si c’était définitivement impossible, condamné à un échec et à la souffrance pour Zayan, alors c’était inutile d’essayer. Je n’étais pas un monstre, je n’allais pas le blesser plus que ce n’était le cas.