Voilà longtemps qu'il n'avait pas remis les pieds par ici. Avec tout ce qu'il s'était passé dans sa vie, il n'avait pas vraiment pris la peine de se rendre à proximité de sa famille. Il avait décidé de tourner le dos à son père, mais aussi de laisser Vanessa là. Elle avait oublié de penser, oublier de vivre, et non de suivre des lois, des amendements comme s'ils étaient tout ce qu'il y avait de meilleur en ce monde. Parce que ce qui était positif de la part du gouvernement n'était jamais vraiment la vérité du reste du monde. Non, il le savait. Mais qu'en était-il d'elle ? Il l'avait laissée, seule, réfléchir sur elle-même, et il s'en sentait passablement coupable. Il avait l'impression de l'avoir laissée tombée, et de s'être lavé les mains de tout ça. Alors, il l'avait appelée, et avait débarqué dans l'heure. Leur père était absent, et dans un sens, c'était tant mieux.

Et pour la première fois depuis des années, c'était la main tremblante qu'il appuyait sur la sonnette, sans utiliser ses vieilles clefs qui menaçaient à tout moment de rester coincées dans la vieille serrure qui ne demandait qu'un simple remplacement. Quand elle vint ouvrir, il essaya de sourire le plus large possible, mais tout ce qu'il voyait, c'était qu'il n'y arrivait pas. Il aurait voulu se jeter à ses bras, la serrer fort contre lui, et lui demander pardon. Mais la fierté faisait beaucoup dans la vie de ce professeur. Il regarda sa soeur, et haussa les épaules, comme on offre un cadeau dont on ne sait pas s'il ferait plaisir. «Salut Vaness'» lâcha-t-il simplement, alors que, comme à chaque fois, ils allaient s'installer à l'extérieur de la maison qui tombait chaque jour un peu plus en ruine.

Peut-être que les derniers évènement lui avaient ouvert l'esprit. Et s'il était toujours particulièrement énervé contre son père, il s'était décidé à tendre la main vers sa soeur, la sortir de là. Quitte à ce qu'elle ne vienne habiter dans son appartement tout miteux, mais l'important était qu'elle sorte de cette espèce de spirale infernale. Elle voulait aider leur père ? Très bien, dans ce cas, le meilleur moyen était de réaliser la vérité, et de la lui faire réaliser à la suite. Leur mère avait fait des erreurs, c'était une évidence. Rien que de ne pas se soucier de laisser deux enfants en moyen et très bas âge seuls, au crochet de leur père. Mais il ne pouvait pas continuer de se dire qu'il tournait le dos à Vanessa pour son ignorance. Non, c'était juste inconcevable.

Sa soeur l'invita à entrer, lui proposant du café. Oui, c'était une bonne idée. Il prit la tasse sans hésiter, avant d'aller s'asseoir sur l'un des deux bancs de la petite table d'extérieur. «Je viens pour toi.» lâcha-t-il, comme de rien. Il savait que les choses étaient compliquées entre eux, et il ne venait absolument pas les compliquer d'avantage. Mais sa soeur était une importance capitale dans sa vie. Et il ne pouvait pas continuer à l'ignorer pour avoir grandi sous le joug de leur père, et de ne pas savoir avancer autrement qu'en croyant les mêmes choses que lui. Il se racla la gorge avant de prendre une gorgée de café. «Ecoute je.. Je regrette comment les choses sont restées entre nous depuis ma dernière visite. Je regrette aussi qu'elle ne date d'il y a si longtemps.» Dit-il en reposant la tasse sur la table. Il nota avec un sourire le briquet que Vanessa posa devant lui, et lui lança un grand sourire. C'était un signe de paix de sa part à elle aussi.

«Tu sais, t'es ma petite soeur, et rien ne pourra jamais rien y changer. Mais la dernière fois, au lieu de me comporter comme un grand frère, je me suis comporté comme un vrai con.. Et j'en suis vraiment désolé. Tu méritais pas ça. T'as le droit de croire en quelque chose, et si je te demande de voir les choses, je pense que je n'ai pas le droit de te laisser juste avec cette phrase, ni de te reprocher tes convictions. Je voulais t'ouvrir les yeux sur certaines choses, mais à la place, je n'ai fait que créer de la distance entre nous. J'en suis vraiment navré. Je te demande pardon.» lâcha-t-il, en prenant le briquet, qu'il tritura, sans pour autant s'en servir pour allumer une clope. Lui aussi, avait un peu changé, pendant tout ce temps.

Il soupira, et repris. «Tu sais, je suis un peu nul comme grand frère mais.. Je t'aime. Du plus profond de mon coeur. Et je serais toujours la pour toi petite soeur..» C'était assez rare, mais ça lui faisait du bien d'ouvrir son coeur à Vanessa.